Le conflit Russie-Ukraine : concurrence identitaire vs droit international

Sans rentrer très avant dans l’histoire de l’Ukraine, il est important de rappeler qu’elle faisait partie intégrante de l’Empire russe de 1654 à 1917, date à laquelle elle a déclaré son indépendance avant de se faire rattraper par l’URSS. Si l’on peut admettre que l’histoire de l’Ukraine est marqué par une très longue période de subordination politique vis-à-vis de leurs cousins slaves de l’Est, il est également vrai que cette nation a persisté dans sa volonté d’obtenir son indépendance. Cette dynamique permet de comprendre la création du principal groupe de collaborationnistes ukrainiens, l’Organisation des nationalistes ukrainiens (OUN) fondée en 1929, il était dirigée par Stepan Bandera et disposait d’un bras armé, l’Armée insurrectionnelle ukrainienne (UPA). Les membres de ces groupes ont collaboré avec les nazis pour lutter contre l’Union soviétique et réaliser leur propre vision d’un État ukrainien indépendant.

La dynamique séparatiste dans le Donbass s’explique par un certain nombre de facteurs, notamment des différences ethniques et culturelles, des divisions politiques et économiques, ainsi que des tensions historiques entre les régions de l’Est et de l’Ouest de l’Ukraine. Le Donbass, qui comprend les régions de Donetsk et de Louhansk, est une région majoritairement russophone et russophile, avec une forte présence de personnes d’origine russe ou de langue russe. Cette région a historiquement été liée à la Russie, tant sur le plan économique que culturel. Pendant l’ère soviétique, la région était un important centre industriel et minier, qui produisait une grande partie du charbon, de l’acier et de l’énergie pour le pays. Après l’effondrement de l’Union soviétique, l’Ukraine a connu des difficultés économiques et politiques. Les régions de l’Est, y compris le Donbass, ont été touchées de manière disproportionnée par ces difficultés, tandis que les régions de l’Ouest, plus proches de l’Europe, ont bénéficié d’une croissance économique plus rapide.

En 2014, les tensions politiques entre l’Ukraine et la Russie ont atteint un point critique, avec la destitution du président pro-russe Viktor Ianoukovitch et l’annexion de la Crimée par la Russie. Ces événements ont exacerbé les divisions en Ukraine, en particulier dans le Donbass, où une grande partie de la population se sentait plus proche de la Russie que de l’Ukraine. Le gouvernement ukrainien a réagi en envoyant des forces militaires pour rétablir l’ordre dans la région, ce qui a conduit à des affrontements entre les forces gouvernementales et les séparatistes prorusses. Depuis lors, les combats ont continué, avec des accords de cessez-le-feu qui ont été violés à plusieurs reprises. Le régime de Kiev a également imposé un blocus économique sur la région, ce qui a eu un impact négatif sur l’économie locale et renforcé le soutien aux séparatistes.

Le situation peut être analysée sous différents angles, celui du droit international et celui du contrat social fondé sur la souveraineté populaire et le droit à l’autodétermination. Inutile de préciser qu’à titre personnel, je considère comme le prévoit la Constitution française que la notion de souveraineté populaire est un principe fondamental auquel personne ne peut déroger. Dès l’article 2 de la Constitution française de 1958, le texte énonce que « la Constitution est la norme suprême de l’Etat ; aucune autre norme ne peut s’imposer à elle ». Cela signifie que la souveraineté ne réside ni dans une personne, ni dans un groupe de personnes, ni dans une institution, mais dans le peuple lui-même, qui est détenteur de la puissance constitutive. L’article 3 de la Constitution ajoute que « la souveraineté nationale appartient au peuple », qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum. Cela signifie que le peuple français est le seul souverain, et qu’il peut exercer sa souveraineté directement, par la voie du référendum, ou indirectement, par l’intermédiaire de ses représentants élus.

Le respect de tels principes me semble supérieur à ceux prévu dans le droit international dont l’application est singulièrement influencée par les rapports de force, notamment économiques et militaires. Bien sûr, le droit international prévoit le principe de souveraineté des États et de l’intangibilité des frontières , une fois qu’une frontière internationale est établie, elle ne peut pas être modifiée unilatéralement par l’un des États concernés. Toute modification de la frontière doit être négociée et acceptée par les deux parties. Contrairement aux médias occidentaux qui ont une position pro-ukrainienne sans nuances, il est possible de résoudre le conflit de manière pacifique en organisant un référendum pour la Crimée et le Donbass, comme cela a déjà été fait en mai 2014 et en septembre 2022. Toutefois, il est peu probable que l’Occident soutienne et reconnaisse la validité de ces référendums qui auraient le mérite de s’accorder à la volonté et donc à la souveraineté populaire. Les blocs en conflit, l’Ouest allié à l’OTAN et l’Est, continueront probablement à chercher à gagner la guerre plutôt que de parvenir à une solution pacifique. Cette situation rappelle l’intervention américaine en ex-Yougoslavie, où les 37 465 bombardements de l’OTAN ont clairement enfreint le droit international. Revendiquer le respect du droit international est un argument mobilisé par l’Occident seulement dans la mesure où il concorde avec ses intérêts.

Alan Kleden

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